vendredi 12 août 2016

Qu'y a-t-il derrière les chataignes, les cochons noirs, la coppa. ?

 Ah, les Corses ! Que n'entend-on pas comme blagues sur les Corses ! Que n'entend-on pas sur les explosions de maisons en Corse ! Que n'entend-on pas sur le machisme, la mafia corse ! Bref, quand on prononce le mot “Corse”, tous les clichés reviennent sur le tapis. Mais quand on a des ami-e-s corses, qu'on y est déjà allé plusieurs fois, on voit les choses bien différemment.

                 La Corse, une destination de vacances de mer ?

Bien sûr, l'été, la population en Corse est multipliée par 10, les prix augmentent sans forcément redescendre en septembre, les routes sont surchargées et on roule au ralenti, les bords de mer sont envahis...L'ile de Beauté mérite bien son titre car c'est une pure merveille que cette montagne dans la mer. Et toutes les personnes qui y ont fait un séjour sont unanimes sur ce point : c'est beau !

                                            le village de LAMA , au-dessus de l'Ile Rousse

Mais, pour que cela soit préservé et que y vivre soit ...vivable, il faut se battre, innover, aider...Jusqu'à présent, la Corse était mise sous perfusion, de façon intentionnelle pourrais-je même dire, tant la France veut garder l'île dans son giron. Mais cela veut aussi dire que les subventions agricoles n'arrivent pas, que le développement des énergies n'est pas incité, que le littoral subit des assauts urbanistiques permanents... On peut critiquer tant qu'on veut indépendantistes et autonomistes, mais sans eux, le pourtour de la Corse serait une immense marina avec ses riches villas (privées) qui envahiraient toute la côte pour une occupation estivale minime en défigurant les magnifiques paysages comme on peut le voir sur la Côte d'Azur ou en Espagne...
Les Corses sont avant tout des montagnards et tous les dangers pour eux viennent de la mer.




                                      Une région autonome

Aujourd'hui, les indépendantistes-autonomistes ont gagné les dernières élections régionales et après de longues années de batailles politiques, ils sont enfin “aux affaires”. Ceci a été marqué dès leur arrivée au pouvoir par des discours et prises de parole en ...corse. Cela a fortement choqué le gouvernement français très attaché au centralisme hexagonal et la langue unique de la Nation. Mais, comme dit si justement Ghjussepu Maestracci de Ava Basta : “ Si la République s'était appuyée sur les langues régionales, on aurait trouvé les mots pour dire “parking” ou “week-end” !”
Cela fait réfléchir. Voilà en tout cas, une “région” de France qui revendique pleinement son ancrage, sa culture et ses ambitions : pouvoir vivre et travailler au pays en le préservant et en le développant selon ses propres critères et sa propre culture. Lisez Paoli et sa constitution, combien la femme était le pilier et reconnue par le droit de vote bien avant que les moeurs évoluent “sur le continent”. Un précurseur, un exemple...
Et pour clore sur ce sujet de l'autonomisme-indépendantisme corse, sachez que leurs combats n'ont fait aucun mort (pour être honnête, la seule mort qu'ils ne digèrent pas est l'affaire de l'assassinat du Préfet Erignac, aujourd'hui toujours pas élucidée) ; les seuls dégats ont été matériels et bien ciblés.


Tallamoni et Simeoni, les nouveaux "dirigeants politiques " de la Corse


En Corse, il y a la possibilité d'avoir une agriculture à l'intérieur des terres, mais les subventions quand elles sont promises pour l'aide au développement n'arrivent pas ou très, très tardivement et rien ne peut être viable à ce jeu pervers où la France exerce une sorte de chantage de dépendance.
Concernant l'énergie, en Corse, il y a du soleil, du vent et de l'eau qui coule des montagnes. Ces trois facteurs déterminants pourraient permettre une certaine autonomie énergétique, mais rien n'est fait pour les développer.

Dans ce souci de reprise en main de leur destin, le nouveau gouvernement régional fait des efforts accrus depuis quelques mois et lance des perspectives, des initiatives, avec un projet clair et localisé afin de redynamiser la Corse en mettant en avant ses potentialités et permettre aux jeunes de rester et vivre sur l'ile.


C'est dans cette optique aussi que je suis tout particulièrement la problématique des déchets puisque dans la période où j'étais délégué au sein de la Communauté de Communes de Guebwiller, j'avais largement initié et contribué à un changement de politique sur ce sujet. Aujourd'hui, c'est Jacques Muller, ancien sénateur avec lequel j'ai travaillé trois ans qui a été contacté pour faire partager notre expérience et expertise auprès d'associations corses.




                  “Si tu tries, t'as tout compris”
 
C'est le slogan de l'association “Zéro Frazu” dont la portUne région autonomee-parole, Colette Castagnoli est une active militante. Les déchets ménagers sont enfouis à 92% en Corse. A titre de comparaison, à certains endroits de France ou d'Italie, il ne reste plus que 20 à 30 % de déchets enfouis. Le tonnage est important et donc il faut trouver d'autres solutions pour ne pas faire de l'ile très rapidement une gigantesque poubelle. En juin 2015, une des plus grandes décharges de l'ile, celle de Tallone (au sud de Bastia) ferme. Il reste cependant d'autres CET (Centre d'Enfouissement Technique) à Vico (au nord d'Ajaccio), à Prunelli di Fiumorbo et à Viggianello. Mais ils saturent également.
Bien sur, le Syvadec (SYndicat de Valorisation des Dechets de Corse) qui les gère a proposé d'autres solutions : un incinérateur (largement combattu et abandonné), une unité de tri bio-mécanique (largement contesté et refusé selon la loi littoral).
C'est avec cet historique et dans ce contexte que l'Office de l'Environnement Corse (OEC) publie le 27 mai 2016 des nouvelles orientations stratégiques (2016-2020) avec des plans d'actions qui mettent en avant les techniques de tri, la collecte au porte à porte et la tarification incitative. L'idée est  de réduire tous les déchets ménagers à la source et de valoriser au maximum tout ce qui est recyclable et compostable. Bien sûr, il y a des résistances à cette nouvelle politique. Le tri à la source et la valorisation font diminuer de suite les volumes à traiter avec des conséquences pour les opérateurs : moins de transports et des tarifs à la baisse dans les centres de traitement des OMR (Ordures Ménagères Résiduelles). Mais le nouveau gouvernement régional corse a clairement défini sa ligne. Il faut dire que des exemples de compostage, tri, recyclage à 80% existent déjà en Corse à Aghione (au nord de l'ile) et à Girolata.


                                     la Corse, non-violente


On est donc loin de l'image d'indépendantistes-autonomistes assimilés longtemps à du terrorisme armé et c'est même un activiste non-violent qui oeuvre beaucoup pour changer sa région, son île, son pays. C'est en effet Jean-François Bernardini (chanteur du groupe I Muvrini) qui a contacté Jacques Muller, mais aussi des représentants italiens sur ce sujet des déchets, et il agit également sur d'autres problématiques.
C'est une figure incontournable de Corse, respecté et écouté, cohérent dans ses engagements et dans sa vie.



Oui, j'aime la Corse. Oui, j'ai toujours défendu ces combattants dit indépendantistes-autonomistes, en fait des régionalistes responsables et qui ont une démarche, des moyens d'action et un discours bien différents de nos régionalistes alsaciens, ou autres.

                     La Corse, un exemple et un précurseur

 
On parle peu du changement politique en Corse et pour cause. Il pourrait devenir très vite un exemple pour celles et ceux qui sont pour une "Europe des Régions" avec des régions à gestion autonome et libres d'interagir avec ses voisins et d'autres régions sans passer par le diktat pyramidale du centralisme français. Mais pour cela, il faudra changer nos institutions vers une 6 ième République avec une représentation proportionnelle et paritaire, sans cumul et à mandat de durée limitée à 2 et surtout avec des régions plus autonomes dans une sorte de système fédéral comme dans pas mal de pays au monde.

La Corse est donc un bel exemple de changements de gouvernance et précurseur comme l'était Pasquale de Paoli en son temps avec sa République Corse (1755-1769) et sa Constitution.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Les commentaires sont lus avant publication non pas pour censure ou rejet, mais pour un filtrage concernant insultes, attaques personnelles essentiellement.
Vous pouvez signer vos textes-commentaires pour des réponses personnalisées, des échanges dans le débat.